MONTMEDY
du 1er Août 1914 au 1er Juin 1915


   Aucune relation, Je crois, de la vie à Montmédy pendant la guerre de 1914-18 n'a été jusqu'ici publiée. Celle que nos lecteurs trouveront ici ne manquera pas de les intéresser par sa précision et son objectivité.
    Ils regretteront  certainement avec moi qu'elle embrasse seulement les dix premiers mois de la tourmente. Ils ne manqueront pas non plus de constater qu'elle n'est pas signée. Son texte dactylographié, est entre mes mains depuis trente ans. Toutes les recherches que j'ai faites pour percer son anonymat sont restées sans résultat. Un seule indication, et bien vague : en parlant des écoles, l'auteur dit qu'elles sont ouvertes « avec le concours des institutrices restées là-bas ». Ceci permet de penser que l'auteur, après avoir vécu à Montmédy pendant les dix premiers mois, a été rapatrié, à l'été 1915, en France libre, où il l'a écrite, obligé nécessairement de se limiter à la période précitée.
    Bien que portant en tête la mention manuscrite: Confidentiel, je la donne telle quelle, sans aucun commentaire. J'y ajoute seulement quelques brèves annotations rectificatives de détail.
P. ERRARD.
SOMMAIRE
La mobilisation. Les débuts de la guerre.
Mouvements de troupes. Combats autour de Montmédy (2-27 août).
L'évacuation de la garnison (27 août). - Combat de Brandeville et Murvaux (29 août).
L'entrée des Allemands le 27 août; leur installation.
Les. chemins de fer.
Guillaume II à Montmédy. - Galanterie impériale. Notes d'un officier allemand sur Marville.
Les amours du Kronprinz à Montmédy et Stenay.
L'attitude et les procédés des Allemands.
L'attitude de la population.
La Vie, les Vivres, le Ravitaillement, les Environs.
Bataille de Brandeville

La mobilisation

Les débuts de la guerre


Comme dans tout le reste de la France, la mobilisation s'effectua à Montmédy avec une impeccable perfection, sans un seul accroc. Dès la première heure, les trains militaires commencent à se succéder sans interruption, venant de Paris ou du Nord, chargés de troupes pleines d'entrain; ils déposent à Montmédy beaucoup de mobilisés de toutes armes qui se rendent à leur lieu de convocation avec bonne humeur et résolution.
 La place forte, représentée par la ville-haute, est ausstôt mise en état de défense avec une fiévreuse activité; cette opération eût été facilitée encore, si l'on n'avait pas cru devoir, il y a quelques années, supprimer la chefferie de génie de Montmédy, pourtant de première utilité dans une place frontière; il était d'ailleurs question, depuis quelque temps, de la rétablir. En avant des fossés et des remparts dans le roc, dus à Vauban et capables de défier tous les 420 germano-autrichiens, est installé tout un réseau de fils de fer barbelés; on creuse des tranchées dans les prés et champs environnants pour retarder l'investissement, empêcher toute attaque de vive force et faciliter la défense mobile, surtout au nord de la citadelle sur le Plateau du Haut des Forêts.
On arrête préventivement, pour les mettre en lieu sûr, plusieurs individus d'origine étrangère, signalés dés le temps de paix comme suspects.
    A l'Arsenal règne une intense activité; on y charge des obus sans discontinuer. Un témoin oculaire, mobilisé, qui s'y rendait à ce moment, dit que la place avait 45.000 obus disponibles (les Allemands en tirèrent 20.000 sur Longwy au cours de leur bombardement de cinq jours et cinq nuits). Un autre, appartenant également à l'armée, nous parle de 200.000 obus et de 200 canons de gros calibre qui y auraient été amenés. Cependant on nous affirme qu'il n'y avait que deux batteries de 120, toutes les autres pièces étant du calibre 90. Une de ces deux batteries resta affectée aux remparts, de la citadelle; l'autre fut employée pour la défense extérieure et placée au-dessus de la gare, a flanc de côteau du versant St-Martin qui termine le Haut des Forêts du côté de la Ville-basse. Elle enfilera la ligne de chemin de fer et la vallée de la Chiers, dans la direction de la Belgique et de Longuyon.
    Quant au tunnel de 835 mètres de long qui s'ouvre à cent cinquante mètres de la gare, sur la voie des Ardennes, il est miné de trois fourneaux reliés par un cordon détonnant permettant de provoquer une explosion simultanée. Au-dessus de son entrée, du côté de la ville, une tranchée profonde est creusée et garnie de mitrailleuses pour renforcer l'obstacle formé par les deux portes en fer forgé placées depuis longtemps à chaque orifice du souterrain pour en interdire l'accès à volonté.
    Entre temps, une compagnie du 165e est envoyée occuper les hauteurs au-dessus de Villécloye sur la rive gauche de la Chiers, Montmédy étant sur la rive droite, du côté de Velosnes.
    L'autorité militaire fait évacuer aux 200 habitants civils qui s'y trouvent, la ville-haute, qui est entièrement et exclusivement occupée par la troupe. Ces évacués se casent tant bien que mal à la ville-basse, en partie dans les logis vides.
Le service postal et télégraphique fonctionne bien. De même tes chemins de fer. Jusqu'au 24 août, trois trains quotidiens assurent les communications régulières avec Paris et Charleville. Le 11 août,  jour de l'investissement de Longwv, la voie des Ardennes est coupée à Longuyon, et le lendemain plus à l'est, à Spincourt.
    Depuis l'ouverture de la période de tension, les habitants, les autorités et le service postal de la Belgique, pour la partie comprise entre Montmédy et le Grand-Duché de Luxembourg, renseignent spontanément et minutieusement les autorités françaises sur les opérations et mouvements des Allemands.
    La ville est très animée et le succès de la mobilisation communique à tous confiance et entrain. Chaque jour les communiqués officiels sont affichés à la Sous-Préfecture où une grande affluence de personnes viennent les consulter pour satisfaire leur légitime curiosité et échanger leurs impressions.
    Des officiers de la garnison, rencontrés à cette époque, déclarent que la place est en état de tenir trois mois, et que toute la garnison est décidée à faire son devoir.
    Un incident est venu malheureusement attrister cette heureuse période. Le capitaine Aucouturier, du 165e d'infanterie, excellent officier, surmené par la somme de travail fournie par lui depuis le premier jour de la mobilisation, est pris d'un accès de fièvre chaude et à coups de revolver blesse deux soldats; il faut le diriger sur Charleville. Le gouverneur de la place, depuis quelques mois seulement à Montmédy, l'y accompagne et reçoit là-bas un autre commandement. Il est remplacé par le lieutenant-colonel Forez, de la territoriale.
    La garnison comprend environ 3500 hommes : le bataillon du 165e s'y trouvant en temps de paix, commandé par le commandant Hugues; un bataillon du 45e territorial, deux batteries du 5e régiment d'artillerie de forteresse, un détachement de génie; d'autres de chasseurs forestiers, gendarmes, douaniers et une section d'infirmiers militaires.


Mouvements de troupes

Combats autour de Montmédy

(2-27 août)
    Dans les premiers jours d'août, nos troupes commencent à affluer vers la frontière; débouchant du secteur Consenvoye-Stenay, elles s'établissent sur les hauteurs de Marville et s'échelonnent par Damvillers, Romagne-sous-les-Côtes, Ornes, jusqu'à la région de Verdun; pendant que d'autres se portent en couverture par Spincour, Longuyon, Mangiennes; partout on creuse des tranchées, on barricade rues et ruelles avec des chariots, et pendant une quinzaine de jours, on se tient sur une vigilante défense pour permettre l'entière concentration de nos corps d'armée.
    Le 2 corps d'armée tout entier, dont dépend Montmédy, se concentre dans ces parages. Le quartier général du général Gérard, d'Amiens, qui le commande, est installé au château de la famille d'Imécourt à Louppy-sur-Loison, à 10 kilomètres en arrière de Montmédy.
    Parmi les mouvements de diverses unités, opérant dans celle région, nous pouvons mentionner ceux du 91e régiment d''infanterie (Mézières-Charleville) d'après le récit qu'en a adressé l'un de ses officiers à L'Ardennais de Paris.
    Embarqué à Charleville le 1er août, il débarque le même jour à Stenav sous une chaleur torride; puis il gagne Vittarville, grâce à une marche de 22 km. par Damvillers; il y reste huit jours, creusant des tranchées, tirant sur les taubes qui s'aventurent jusque-là.
    Le 9 avril à 9 heures (lu matin, départ pour soutenir un détachement t de chasseurs à pied qui a dû reculer à Spincourt, faute d'artillerie et devant un ennemi supérieur en nombre. Le soir, cantonnement à Mangiennes.
    Le lendemain commencent les combats de Mangiennes-Pillon qu'il n'est pas dans notre cadre de retracer ici. Du 11 au 20 août, repos pour le régiment qui revient rejoindre son corps d'armée à Jametz. Vers le 18 ou 20 août, l'ordre de marche en avant est donné. Pendant deux jours et deux nuits, c'est un défilé interminable à Montmédy, de cavalerie, d'artillerie, de convois de toutes sortes, d'automobiles; tous les régiments se portent avec allégresse vers la Belgique, vers l'ennemi...
    Le 21 août à minuit, le 91e régiment quitte Jametz et vient remplacer à Flassigny, entre Marville et Montmédy, le 120e à 4 heures du matin. On entend le canon tonner au loin, vers le Nord-Est, et à 10 heures du matin, départ pour Montmédy qu'on traverse rapidement. Cantonnement
à Sommethonne , le premier village belge an nord1 de Montmédy, à 9 kiloniètres, sous un violent orage.
Le canon tonne toujours au Nord-Est; des caissons d'artillerie passent à toute vitesse; c'est la marche sur Neufchâteau qui s'effectue.
Nos troupes, inférieures en nombre, se heurtent des effectifs considérables, supérieurement abrités et retranchés dans les bois qu'ils ont eu, depuis trois semaines, le temps et le soin de mettre en état de défense; elles doivent reculer avec de fortes perles, mais sans être démoralisées.
   Le 22, la bataille s'engage sur un nouveau front plus rapproche : Florenville-Virton ; après des prodiges de valeur, là encore il nous faut reculer; l'élan trop confiant et l'ardeur imprudente de nos soldats et de leurs charges à la baïonnette échouent contre le feu de mitrailleuses et d'obus invisibles autant que formidables de l'ennemi.
    Beaucoup d'entre eux, blessés, sont ramenés à Montmédy par la ligne d'Ecouviez, en voiture, en auto, sans avoir pu tirer un coup de fusil et sans avoir vu les boches, tapis dans leurs terriers.
    Le 91e quitte Sommethonne à 4 heures du matin et à 6 heures, il arrive à Houdrigny et se déploie derrière un petit bois en avant du village dans la direction de Paliseul2, comme troupe de réserve. En avant, tine division du 4e corps d'armée occupe les hauteurs sous le feu des canons allemands.
    A 7 heures du soir, nos 75 commencent à entrer en danse; le 91e et trois autres régiments, formant un front d'un kilomètre, reçoivent l'ordre de charger à la baïonnette; ils arrivent jusqu'aux tranchées allemandes malgré une pluie de mitraille, et l'ennemi fuit devant eux.
    C'est la victoire : hélas ! non, ce n'en est que le mirage. La même nuit, nos troupes se replient et alors commence cette retraite qui se prolongera jusqu'au réveil de la Victoire de la Marne3 .
    Aux convois de prisonniers des jours précédents, succèdent dans les rues de Montmédy les convois de blessés et de Belges fuyant devant la barbarie de l'envahisseur, et colportant sur leur passage le récit de leurs atrocités. Les blessés sont immédiatement répartis dans tous les locaux affectés à cet effet : salle des fêtes, écoles supérieures de filles et de garçons, hôpital militaire et hôpital civil, ils y reçoivent les soins dévoués du personnel médical et hospitalier de la section montmédienne de la Croix-Rouge, dont l'abnégation et le zèle ne se démentiront pas un seul instant.
    Les soldats blessés légèrement y subissent un premier pansement et sont dirigés sur Laon et Charleville; seuls restent sur place les blessés non transportables Le ]endemain 23, le 91e ou du moins son 2e bataillon, après un repos de plusieurs heures, arrive vers 8 heures du soir à Breux, village français à 9 kilom. au nord de Montmédy, près de la frontière belge; il y rencontre quelques soldats d'infanterie de marine, en désordre, venant de Neufchâteau et qui font un récit attristé de leur échec dans ces parages.
    Le 24, à une heure du matin, départ; à 7 heures, passage au village ardennais d'Herbeuval, toujours le long de la frontière belge, puis rentrée dans la Meuse; toute la matinée sert à creuser une tranchée le long de la route d'Herbeuval à Thonne-le-Thil sous le regard inquisiteur d'un taube. Ordre est donné de tenir là jusqu'à 6 heures du soir.
A deux heures, premiers coups de canon; les avant-postes se replient lentement. A 6 heures, les obus arrivent plus près des lignes; ils tombent en grêle sur l'emplacement occupé le matin par un parc d'artillerie et qui est par bonheur parti.
    Les troupes traversent Thon ne-le-Thil au milieu des habitants restés et tout tristes de voir le recul de nos troupes.
   À la sortie du village, ils rencontrent et dépassent le navrant exode des habitants avec le bétail et ce qu'ils ont pu sauver.
    Après plusieurs heures de marche, bivouac près de Montmédy sur un plateau escarpé où campent déjà plusieurs régiments.
    Le lendemain 25 à 4 heures du matin, départ du 91e et marche sur Stenay où il arrive au milieu de la nuit avec un retard occasionné par l'encombrement des routes par les convois d'artillerie, les émigrants.
    A la sortie de Stenay, traversée d'un pont, où un sapeur du génie, mêche allumée à la main attend, pour le faire sauter, le passage du dernier soldat ou voiture.
    Derrière la Meuse, nos troupiers se reposent quelques heures, dans un champ toujours avec défense de faire du feu pour ne pas attirer l'attention de l'ennemi.
    Le 26, reprise de la retraite à 4 heures du matin par des chemins montueux et boisés pour laisser les routes aux convois et échapper aux repérages de taubes.
    Le train de ravitaillement attendu à Stenay avant été pris par l'ennemi, il faut jeûner toute la journée. On calme la faim en grignotant des grains de blé, glanés dans les champs.
    Bivouac à Beaufort avec deux régiments dans un vaste champ où on prend un repos réparateur. A 11 heures, le 2e bataillon repart aux avant-postes dans la forêt de Dieulet.
    A 3 heures, il fait une nuit opaque trouée par les obus éclairants des hoches; on est à 200 mètres de la Meuse où on entend l'ennemi construire un pont. Le 27, on quitte l'emplacement de cette nuit-là. Le 91e rencontre le 42e d'artillerie qui annonce avoir mitraillé et décimé l'adversaire. A 2 heures, marche sur la gauche vers les Ardennes dans une clairière on rencontre tout un rassemblement de blessés français et allemands avec des marsouins qui prirent part au combat livré à Cesse quelques heures auparavant; on laissa l'ennemi construire son pont sur la Meuse et nos 75 le démolirent quand y eurent passé des troupes allemandes qui furent ensuite chargées et jetées à la Meuse par nos fantassins.
A 5 heures du soir, nos mitrailleuses abattent un taube, dont les deux passagers sont faits prisonniers au seul et au même cri de Vive la France!

*
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    Le 24 août à 11 heures du matin, la gare de Montmédy recevait l'ordre d'évacuer tout son materiel et son personnel. Le soir même, il ne restait plus ni une machine ni un wagon; les garde-voies recevaient à leur tour l'ordre de se replier; un train d'évacuation les emmena à Sedan d'où ils durent gagner Charleville à pied (20 kil.), car la gare de Sedan évacuait aussi son matériel dans la nuit du 24 au 25 août.
Montmédy était isolé et livré à la seule protection de sa garnison, les troupes françaises se repliant sur la Meuse.
    Divers engagements eurent lieu durant cette période, à Marville entre autres.
    Le 25 août, écrivait un officier allemand sur un carnet de notes trouvé sur son cadavre, un petit engagement Herbeuval, à la suite d'une prétendue agression de soi-disant francs-tireurs contre les teutons, ceux-ci en profitèrent pour, de leur propre aveu, fusiller 15 civils et incendier une maison.
    Le même jour, autre escarmouche dans ces parages (à moins qu'il ne s'agisse de la même). Un peu en arrière, entre Breux et Thonne-le-Thil, à 2 heures de l'après-midi, 11douaniers de la brigade de Breux, commandés par le sous-brigadier Triboulet, virent arriver du village belge de Gérouville une trentaine de cyclistes et uhlans boches. ils réussirent à les tenir en échec pendant une heure et demie et en tuèrent cinq. Un détachement de la garnison de Montmédy eut ainsi le temps d'accourir à leur secours et de mettre l'ennemi en fuite après un engagement qui dura jusqu'à la nuit.
    Trois douaniers y furent blessés : les préposés Peltier, Curier et Léon François; ils furent ramenés en auto à l'hôpital de Montmédy, et, de là, évacués sur celui de Laon.

L'évacuation militaire de Mon tmédy

(27 août)

Les combats de Brandeville et de Murvaux

(29 août)
    Ce fut le 27 août que la garnison de Montmédy évacua la forteresse en exécution des ordres reçus par elle de l'autorité supérieure, 48 heures auparavant, d'avoir à détruire les vivres, munitions, rendre les canons inutilisables et se replier comme elle pourrait vers l'intérieur du pays.
Des commentaires variés furent colportés et les bruits les plus fantaisistes, tant cette décision parut incompréhensible et en raison du silence officiel fait autour de cet événement et de l'occupation de Montmédy par les Allemands.
    Le pays n'apprit d'ailleurs ces événements que par le communiqué officiel allemand qui annonça à la fois la défaite de Charleroi, la prise de Givet et de Montmédy.
    Au reçu de l'ordre ci-dessus mentionné, les instructions qu'il contenait furent exécutées sur-le-champ; les vivres furent détruits ou avariés; on vida les bidons de pétrole sur les sacs de farine, mais il y avait tant de denrées qu'il est douteux que tout ait pu être détruit; seul un vaste incendie eût pu les anéantir.
    Les armes et canons furent mis hors d'usage; les culasses des pieces d'artillerie démontées et cachées, mais retrouvées en partie par les Allemands.
    Il avait été question de faire sauter la ville-haute, où le bruit en avait couru; aussi pendant une partie de la journée beaucoup d'habitants de Montmédy-bas quiltèrent la ville pour éviter dêtre ensevelis sous les ruines de leurs maisons et se tinrent dans les champs situés au-dessus de l'hospice civil.
    Cette hypothèse d'une exécution d'ailleurs presque impossible ne se réalisa pas. L'artillerie de la place tira dans la journée 5 coups de canon en signal d'alarme, dit-on; c'étaient les premiers et les derniers des artilleurs français.
A 8 heures du soir, formée en une longue colonne, la garnison quittait la ville-haute, commandant en tête; elle
défila devant l'Esplanade, au col de Tivoli, suivit le chemin de la Chevée, traversa toute la ville-basse au milieu de la consternation générale, franchit le pont sur la Chiers, qui fut détruit partiellement derrière elle, gagna la prairie du Brû et longea la voie du petit chemin de fer Montmédy-Damvi!lers-Verdun dans l'espoir d'atteindre cette dernière ville à l'abri du massif boisé qui forme cette partie de l'Argonne.
    Deux on trois jours plus tôt, cette opération eût pu s'effectuer sans danger, mais à cette date elle était périlleuse, car l'armée du Kronprinz se dirigeait à marches forcées sur la Meuse, dans une direction perpendiculaire à celle de la petite troupe; leur rencontre était inévitable; ce fut ce qui arriva.
    Le 27 août, les Allemands occupaient Jametz et les villages voisins du Sud, vers Damvillers et continuaient leur avance.
    A 2 kilomètres de Montmédy, dès l'entrée en forêt, au lieu dit les Onze fontaines, confluent d'un petit ruisseau avec la Chiers, on crut voir ou entendre des détachements ennemis et un certain désarroi se produisit dans la colonne; plusieurs soldats tombèrent à la rivière et se noyèrent.
    Après cette premiere émotion, on se reforma et on reprit l'itinéraire fixé, toujours sous bois; au point du jour on arriva à Han-les-Juvignv où l'incident des Onze fontaines se reproduisit. Toute la journée fut employée à rester sous le couvert des bois par prudence, car on entendait le bruit des convois allemands en route et on voulait attendre la nuit pour traverser les espaces découverts afin de pouvoir échapper à la vue de l'ennemi; on se nourrit à l'aide des vivres de réserve emportés. Le 29 à l'aube, comme le flot ennemi ne cessait de couler par la route de Murvaux et qu'il fallait passer coûte que coûte, la garnison marcha sur Brandeville ; dans les bois voisins, elle rencontra deux corps d'armée ennemis, les 13e et 14e, avec leur artillerie et leurs mitrailleuses. Les Français étaient 3.200 et avaient laissé canons et mitrailleuses à Montmédy. Les Allemands occupèrent les hauteurs et ajoutèrent ce nouvel avantage à celui de la supériorité numérique.
    La bataille commença à 4 heures du matin à la sortie du bois sur la route de Louppy à Murvaux; l'attaque fut engagée par les 13e, 14e, 15e, 16e compagnies du 165e; furent tués, le commandant Hugues, les capitaines Basserot et Mathieu, du 165e, les adjudants Pellet, Dorigny le sergent-fourrier Delahaye. Le lieutenant-Colonel Forez fut blessé. Parmi les morts ou disparus, il faut compter aussi le commandant Le Geay4 , commandant la batterie d'artillerie; le capitaine Girard, commandant le détachement du 3 génie, les sous-lieutenant,; Moll, Cervantis5, le maréchal des logis d'artillerie Marchand.
Un survivant de ce combat raconte que sur 35 sous-officiers, il n'y en eut que 5 qui ne furent pas blessés; il ajoute même, ce qui n'est pas prouvé, que les Allemands, pour empêcher  les nôtres de tirer, avaient placé devant eux des habitants de Brandeville.
Le feu terrible des canons et mitrailleuses boches refoule les nôtres dans le bois avec des peites sanglantes. De toute la bataille, ajoute un autre correspondant, je n'avais pas quitté Moureaux, de Grand-Verneuil, mon sergent-major de section. Nous nous défendîmes dans le fossé, à la lisière. Joseph Demouzon6 et Joseph Otelet7 firent le coup de feu avec moi et disparurent. Une demi-heure avant de nous
rendre (cernés et pris entre deux feux) Marcel me rejoignit et on ne se quitta plus. Conduits à Jametz en passant par Louppy, le soir on a couché à Marville dans l'église, et le lendemain à une heure du soir, on embarquait à Longuvon pour Ingolstadt où on arrivait le lendemain à 4 heures soir et à 7 heures au fort Hartmann où nous restâmes six mois. A 8 heures, deuxième détachement; nous étions 750 de la garnison, Nahan de Sommethonne; l'adjudant Bonnot8 , professeur; Rey9; Brion10  coiffeur; Lagosse11 architecte, Spiral, étaient avec nous. Sur 23 de
Thonne-la-Long, à Montmédy, j'en connais 11 prisonniers: lieutenant Klein, Grunevald, Caufman, Simonet. Pagès. Lambert. L. Prignon, R. Lepaute, Demouzon Marcel, Demouzon Joseph, Demouzon J.-B.12
    Le docteur Lorentz, médecin militaire de la garnison, fut emmené avec son aide-major à Damvillers.
    Les Allemands obligèrent les maires de Murvaux et de Brandeville à faire enterrer les morts par les habitants. On évalua le nombre de ceux-ci de notre côté à 200 et celui des boches à un chiffre supérieur.
Nos soldats survivants furent répartis dans les trois camps allemands où ils sont encore : Ulm, lngolstadt, Stuttgart.
    Très peu purent s'échapper. Les uns, au nombre d'une quarantaine, gagnèrent Verdun au prix de fatigues et de privations considérables, ayant dû vivre dans les bois plusieurs jours consécutifs. Parmi eux, le soldat GrandJean, de Vigneul-sous-Montniédy, le maréchal-des-logis Joseph Pau, de Vouziers. Celui-ci dut à une syncope opportune d'échapper aux balles de la première sentinelle française qu'il rencontra et devant laquelle il tomba d'épuisement. Quelques autres, peu soucieux d'être emmenés en captivité, étaient rentrés la veille à Montmédy et y avaient échangé leurs effets militaires contre des effets civils.
D'autres enfin purent se dissimuler dans les bois et y vivre quelque temps, ou furent recueillis par les habitants des villages voisins; mais les Allemands en ayant eu vent, firent annoncer qu'ils effectueraient des perquisitions domiciliaires et que tous ceux qui abritaient des soldats français s'exposaient à être fusillés ainsi que ceux-ci. voir annexe
    Tout un détachement parvint à s'échapper; il était ainsi composé : MM. Barthélémy, adjudant au 165e; Derupt caporal territorial au 3e génie; Jacob, caporal rengagé au 165e; Buigrand, réserviste au 165e; Mauclaire, du 5e d'artillerie; Lévêque, du même corps; Benoit Lefèvre et Biasse, du 165e; le brigadier des douanes Chavet, de Velosnes : ils vécurent 55 jours en forêt, d'abord pendant 5 jours de leurs vivres de conserve : biscuits, sardines, puis de pommes de terre ou'ils arrachaient avec leurs mains dans les champs près de Quincv, à 6 kilomètres de Montmédy.
    Enfin une corvée de deux hommes ayant été aperçue par l'ennemi, ceux-ci la suivirent pour voir où elle allait, et, peu après, les fugitifs furent cernés par un fort détachement boche. Il n'y avait qu'à se rendre, car, mourant de faim, ces hommes étaient à bout de forces; c'était le 28 octobre, à Brandeville; ils furent conduits à Loison, et de là en Allemagne.
    Un douanier de la brigade d'Ecouviez, Baucard, depuis incorporé au 5e bataillon de douaniers, 3e compagnie, à Château-Thierrv, chercha à gagner Verdun de son côté. Arrêté à Murvaux par des artilleurs allemands qui installaient une batterie, ils lui arrachent les bandes de son pantalon, les boutons de son uniforme. Deux heures plums tard, il parvient à s'échapper au milieu des hurlements de rage de l'ennemi et gagne la forêt; comme elle était cernée, il ne put en sortir et il y resta quatre jours sans manger. Il réussit à pénétrer dans un moulin dont le patron le restaura et lui donna des vêtements civils; il y travailla du 6 au 11 septembre, mais 10000 boches parcouraient la région et ramassaient chaque jour des soldats évadés comme lui; il décampa et put successivement gagner sans encombre Bazeilles près Montmédy, puis Ecouviez et un village belge voisin où il se terra quelque temps.
    Un soldat de la garnison, H. Charton, qui était tombé dans la Cliiers lors de l'alerte des Onze fontaines, réussit à s'échapper, à se procurer des effets civils: il vécut plusieurs mois dans les bois, restant plusieurs jours sans manger. Il put gagner la Belgique, la Hollande, et rentra en France où il reprit du service.
Plusieurs autres soldats avaient pu se réfugier dans un important village voisin, tout proche de Stenay, et y auraient été recueillis et nourris par des habitants jusqu'au jour où ils furent dénoncés; le conseiller municipal faisant fonctions de maire fut menacé d'être fusillé et ne
dut la vie qu'à l'intervention et aux protestations énergiques de plusieurs courageux citoyens, grâce il quoi il fut emmené en Allemagne, ainsi que les soldats dissimulés par de bons Français de l'endroit13.
Nous recevons la lettre suivante
    « Comme j'étais parmi les combattants, et un des rares oui n'ont pas été fails prisonniers, je tiens à vous signaler la conduite héroïque de mon collègue Brule, brigadier des douanes à Montmédy, sergent-major à notre compagnie, qui fut tué d'une balle au cœur, face è l'ennemi, en entraînant sa section dans une charge à la baïonnette, à hauteur de la route de Murvaux.
    « Tombé à mes côtés, je sais où son corps peut reposer et j'ai pu lui enlever sa montre comme souvenir d'un brave, tué au champ d'honneur. Cette relique sera remise à sa famille par mes soins aussitôt que le pays où, malheureusement, cette dernière est restée, sera libéré de
nos ennemis. »
    Dogny Jules,
Sergent au 5e bataillon de douaniers. 3e Cie,
Secteur postal n° 27,
avant guerre, brigadier des douanes a Chauvency-le-Château.

    L'entrée et L'installation des Allemands à Montmédy

(29 août)

Entre le depart de la garnison de Montmédy et l'entrée des Allemands, il s'écoula un intervalle de plus de 24 heures. Ce fut en effet le surlendemain 29 août, à 3 heures du matin, que ces derniers, venant de la direction de Thonne-le-Thil-Carignan, y firent leur entrée; ils occupèrent simultanément la ville-haute et la ville-basse avec leurs precautions habituelles; les troupes rasaient les maison afin
d'échapper à une fusillade possible des fenêtres et de pouvoir y répondre plus facilement que du milieu de la chaussée, où ils pouvaient être canardés des deux côtés.
Ils furent tout droit chez le maire et prirent ensuite officiellement possession de la citadelle et de la ville; dès le lendemain, leur nombre augmenta considérablement et ils occupèrent les divers hôpitaux où il était resté des blessés français.
    La Kommandantur s'installa dans la nouvelle maison Hamot-Richard, près du bureau de poste, la direction des étapes en face à la Sous-Préfecture. Les lazarets, nom allemand des hôpitaux, furent installés dans les locaux propres à cet office et déjà utilisés par nos troupes. Les blessés à la tête furent soignés à l'école supérieure des filles, où on installa aussi un atelier de réparations des armes. D'autres furent installés dans le vaste local de la petite vitesse à la gare, à la salle des fêtes, à l'hôpital militaire, à l'hôpital civil, à l'école supérieure de garçons.
Les typhiques furent transportés à la ville-haute; on y plaça aussi les blessés français restés sur place; ils se louaient des bons soins d'une infirmière luxembourgeoise chargée de leur service, qui les soignait et conversait en français avec eux.
    Un lazaret pour officiers fut aménagé dans la maison Francois-Albustroff, rue du Luxembourg.
Avec leur personnel hospitalier et médical, les Allemands amenèrent des aumôniers, des infirmières, appelées par eux des diaconesses, et dont les moeurs et la tenue laissèrent plutôt à désirer.
    Tous les blessés hoches de l'Argonne furent ramenés à Montmédv, qui devint le grand centre d'évacuation et d'hospitalisation de la région; il y en avait une moyenne de 2.000 en permanence dans les locaux spéciaux; actuellement il n'y en a plus que quelques-uns. Beaucoup moururent, ainsi qu'un certain nombre de blessés français;on en enterra pêle-mêle plus de 1.200, sans distinction de
nationalité, au cimetière de la ville-basse, près du caveau provisoire et dans la fosse réservée aux soldats français morts an siège de 1870; malgré l'emploi de chlore et de chaux, ce fut un vrai charnier et une épouvantable infection ; d'autres furent enterrés, au cimetière de la ville-haute.
Tous les services militaires et hospitaliers se trouvèrent bientôt réunis à Montmédv : dentistes militaires en grand nombre, compagnies de chauffeurs automobilistes, officiers du service des postes et télégraphes. Ces derniers, tous logés dans la rue de Chiny, service d'état-major.
    On y trouve même toute une dynastie Von Gemmingen, barons, comme tout officier allemand qui se respecte; l'un d'eux était colonel, l'autre adjudant et subordonné au premier et le troisième, chef de la Croix-Rouge.
    Le second de cette trinité, dont le chef était orné d'une superbe casquette couleur canari, avait de fréquents rapports, d'ailleurs corrects, avec la population.
    Il y avait aussi un général du nom de Cerno, logé à la Sons-Préfecture, et antipathique à la population. Entre ces divers organismes, l'harmonie ne régnait pas toujours, et il y avait souvent des conflits d'attributions et d'autorité.
    Pendant quelque temps, il y eut même deux Kommandanturs. la deuxième venant de Pierrepont fut installée au « Journal de Montmédy », en face l'église; mais elle n'eut qu'une durée éphémère.
    Il y a un millier de soldats allemands à Montmédy, comprenant surtout les hommes évacués du front pour se reposer avant d'y repartir. Il y a peu de sous-officiers. Par contre, il y a beaucoup de médecins, qui passent pour les meilleurs de l'Allemagne.
        Les Allempands commencèrent par réparer le pont routier sur la Chiers. entre le cimetière et le square Buvignier, dont les Français avaient fait sauter une arche en partant. La circulation y fut vite rétablie. Ils s'employèrent de même sans retard à remettre en état les voies ferrées coupées. Ils démolirent le hangar d'aviation militaire récemment édifié sur le plateau du Haut des Forêts et le transportèrent dans la vallée, plus à l'abri des avions français, dans la pointe de terrain limitée, à la sortie de Thonne-1es-Prés, par la ferme Baudot, la voie des Ardennes et la route Stenay-Montmédy. Ils y installèrent aussi leur parc d'aviation, d'abord situé de l'autre côté de la route, d'où les inondations hivernales les forcèrent à l'enlever.
    Leur parc d'automobiles fut installé à Ecouviez, à 9 kilomètres au nord-est de Montmédy. Sur la grand'place de Montmédy, ils construisirent deux grands hangars en bois pour servir de garages aux nombreuses autos qui sillonnent
les rues de la ville jour et nuit.
    A Tivoli, près de la ville-haute, sont installés un poste de télégraphie sans fil et un canon pour aéroplanes avec munitions et un poste permanent.
    Ils n'ont pas fait de travaux spéciaux de défense à Montmédy; toutefois ils en ont exécuté au dehors, car la route de Verdun est interdite aux habitants, et il faut, pour franchir la Chiers, un sauf-conduit délivré par le bureau des passeports, installé à l'hôtel-de-ville.
    L'éclairage électrique a été conservé et développé par eux, à l'aide de nouvelles machines productrices de force amenées d'Allemagne. De cette façon, les rues sont éclairées toute la nuit, pour faciliter les mouvements de troupes et pour empêcher les autos de se heurter dans les rails de la voie ferrée qui traverse la ville dans toute sa longueur. Ils font d'ailleurs payer par la ville cet éclairage public qui est très onéreux pour celle-ci.
    La lumière électrique continue d'être fournie aux habitants. Ils en paient le prix chaque mois à un agent de la mairie qui passe à domicile; le produit en est versé aux Allemands qui dirigent et exploitent l'usine à leur compte, le directeur-propriétaire, M. Duvernoy, incorporé à la garnison de Montmédy, étant prisonnier de guerre à Stuttgart.
    Les boches se servent aussi des pompes à incendie de la ville pour éteindre les commencements d'incendie que leurs imprudences ou leur ébriété ont provoqués; mais ils en ont fait venir également d'Allemagne.
    Ils entretiennent les routes en bon état, les empierrent et les réparent; le rouleau à vapeur y circule constamment, même en hiver; au début de 1915, en prévision d'une retraite possible, ils ont miné routes et ponts de la région, ainsi que les voies ferrées; ils ont dissimulé en outre des canons aux abords de la place de manière à les rendre invisibles aux assaillants en cas d'attaque, et ont creusé des tranchées sur la côte Saint- [blanc] , sur les hauteurs de Gérouville et Virton, en arrière de Montmédy.
    Il y a dans cette ville environ 700 prisonniers français internés à la ville-haute dans les casemates et chargés du nettoiement des rues de la ville-basse, des cabinets des particuliers, etc., sous la surveillance de soldats boches. Ils n'étaient ni trop malheureux ni trop maltraités; la Croix-Rouge montmédienne leur fournissait de son mieux denrées alimentaires, tabac, vêtements; une petite fête fut organisée à Noël à leur intention, par cette oeuvre de bienfaisance; mais depuis peu l'autorité allemande a supprimé toute relation entre les habitants et les prisonniers. Au début de l'occupation, ces derniers furent employés aux travaux de construction des diverses voies feres créées par les Allemands. Comme tous leurs camarades restés en captivité, ils ne peuvent écrire au dehors.

Les chemins de fer

    Contrairement à ce qui fut dit et écrit dans divers journaux de l'Est, les Allemands n'avaient pas créé de ligne de chemin de fer, même à voie étroite : 1° de Chauvency-le-Château à Stenay; 2° de Spincourt à Dun-sur-Meuse et Montfaucon; il n'y en a qu'une, à notre connaissance, de Spincourt à Darnvillers, et prolongée jusqu'à [blanc]
    Par contre, à Montmédy, ils se sont offert le luxe d'en créer trois :
    La premiere construite par eux est une ligne à voie étroite partant de la gare de la ligne des Ardennes, traverse obliquement le jardin de la gare, dont les arbres sont rasés, et dont l'emplacement est couvert de baraques en bois, pleines de houille et de produits ou outils divers.
De là, sur l'emplacement de la maison Arthur Neveux, qui a été rasée à cet effet, et qui bordait l'avenue de la Gare à son entrée en venant de la ville, elle emprunte le milieu de la route nationale Sedan-Verdun devant la Caisse d'épargne, la Sous-Préfecture, biaise pour raser la maison
Hamot-Richard, file entre le bureau de poste et l'école spérieure de filles par la rue de l'Isle, rase les maisons Uhl, Gravis, boulanger, remonte à droite au coin de la rue Ernest-Mabille qu'elle suit dans toute sa longueur en empruntant une partie du trottoir du côté de l'église.
Devant l'hôpital militaire, à l'aide d'un énorme remblai construit par les boches, la voie s'étire et traverse l'emplacement des maisons Mahut, Migeon et le patronage catholique, oui ont été démolis à cet effet, ainsi que la partie postérieure de la maison Darville, dont, malencontreuseument, la façade subsiste, pour gagner les champs entre la maison Coutin et l'école supérieure de garçons; de là, à flanc de talus, elle vient mourir au Mont Cé où, pendant quelque temps, elle se raccordait à une voie large qui Y passait également et dont il va être parlé. Depuis, ce raccordement a été supprimé, et ce tronçon est, à partir de l'école supérieure de garçons, sans emploi et sans utilité.
Les Allemands ont greffé un branchement qui s'en sépare derriere cette école, franchit la Chiers sur un pont,
qui fut enlevé par les crues de l'hiver dernier, puis rétabli; il rejoint la ligne Montmédy-Verdun à voie étroite dans la prairie du Brû.
    On ne s'explique pas la raison de celle construction puisque la voie Montmédy-Verdun existait toujours par la prairie de Clave et du Brû sans dégradation.
Celle petite ligne a fait un trafic intense; elle ramenait et continue à ramener les blessés venant de la direction de Damvillers; elle ramène aussi la nuit les plus beaux arbres de nos forêts que ces barbares abattent pour expédier chez eux et qu'ils transbordent la nuit à la gare de la ligne des Ardennes, comme s'ils avaient honte de leur mauvais coup. Elle véhicule aussi des munitions, des vivres, du foin, de la paille. Tous les noyers de la région ont été abattus pour faire des crosses de fusils.
    La troisième ligne boche est la plus importante. Quand la garnison française évacua la citadelle, elle fit sauter le tunnel à trois endroits, le détruisant ainsi pour longtemps. On n'eut jamais de nouvelles du sous-officier d'artillerie chargé de le faire sauter, on suppose qu'il a péri; il avait fait campagne aux colonies.
Un éboulement, accompagné d'inondation, s'y étant produit il y a une vingtaine d'années, il fallut un an de travaux pénibles pour le réparer et y rétablir la circulation. Les Allemands se rendirent compte qu'ils ne pourraient obtenir pareil résultat sans des efforts encore plus longs et considérables.
    Avant de partir, la garnison française avait eu l'intention de faire sauter le viaduc de Thonne-les-Prés, faisant suite au tunnel, et dont les 17 arches surplombent et enjambent la vallée de la Thonne au-dessus du village de Thonne-les-Prés. Le génie entoura même la pile du milieu d'un cordon Bickford en vue de la faire sauter la mélinite, mais au dernier moment. ordre fut donné de surseoir et les choses restèrent en l'état.
Il faut le regretter, car la destruction du viaduc aurait obligé l'ennemi à traverser les vallées de la Thonne et de la Chiers dans toute leur largeur pour y prolonger leur voieferrée. ce qui eût exigé de leur part l'établissement d'un remblai considérable et quelques mois de travail de plus.
    Aim contraire, avec la situation qu'ils trouvèrent, il leur suffit de faire partir un raccordement à deux voies larges de l'extrémité du viaduc voisin du tunnel par un coude longeant la partie nord du parc de Beuviot14, coupant la route Thonne-les-Prés-Montmédy-haut un peu au-dessus de son croisement avec la roule Montmédy-Stenay ; il traverse ensuite cette route au lieudit les Oeillons, remonte au
pied dit Mont Cé où elle traverse la route Montmédy-Vigneul un peu en-dessous de son intersection avec la route 47 (Montmédy-Stenay). Ensuite la ligne longe cette dernière à droite, au-dessus de la Chiers, jusqu'au jardin Santt, où elle la coupe à nouveau pour gagner l'ancien bastion des fortifications de Montmédy-bas dominant la route, suit dans toute sa longueur le parc Cochard, traverse perpendiculairement la rue de Chiny, file dans le jardin Spiral entre les maisons Cailleteau et Delaval, iraverse le jardin lthier, coupe perpendiculairement la rue de Sedan sur l'emplacement de l'atelier de menuiserie Harman, démoli pour livrer passage, écorne le jardin Bailleux, passe contre la poudrière militaire, traverse les baraquements militaires en bois construits par les boches en 1870 et dont un des bâtiments fut démoli pour lui livrer passage, le jardin potager de la Sous-Préfecture, la route de la Chevée près de la maison Adam, et vient se raccorder à la voie des Ardennes à l'ancien passage à niveau.
    Par cette ligne, il se fait un transit important jour et nuit; parfois il y passe 90 trains en 24 heures (la moyenne au temps de paix était de 140), qu'il faut parfois deux locomotives pour remorquer, tellement ils sont chargés.
    Le jour, il y passe de nombreux trains sanitaires vides en montant et chargés de blessés en redescendant la nuit. Les trains de voyageurs véhiculent des soldats vers Sedan ou l'Allemagne par Ecouviez et Longuvon. Les trains de marchandises arrivent du Nord, chargés de ferrailles, betteraves, de matériel de guerre endommagé (autos, canons, caissons, etc.); tous ces trains sont accompagnés de soldats armés.
    La même erreur stratégique qui s'opposa à la destruction du viaduc de Thonne-les-Prés empêcha celle du pont du chemin de fer sur la Chier à Ginvry (7 kilom. de Montmédv) , Chauvency-le-Château (4 kilom.), Grand-Verneuil (1 kilom ) , et cependant, à Chauvency, on avait détruit le pont de la route sur la Chiers, Ces destructions auraient rendu pendant quelque temps, indisponible la voie des Ardennes et celle de Montmédy-Ecouviez-Luxernbourg.
    Les deux tunnels existant entre Montmédy et Longuyon furent détruits par les Français en août 1914, mais les ennemis les réparèrent assez vite, et, en attendant, ils établirent des deviations contournant les collines qu'ils traversaient. ce qui leur permit de rétablir rapidement la régularité et la continuité de la circulation.

 Guillaume II à Montmédy

Galanterie impériale

Notes d'un officier allemand sur Marville

    L'empereur de toutes les Allemagnes honora (!) p1sieurs fois la ville de Montmédy de son auguste présence.
Ses déplacements étaient entourés d'un tel mystère qu'on ne sait s'il y coucha. Cependant on disait que des appartements étaient toujours prêts pour lui et le Kronprinz à la Sous-Préfecture. Ce qui le laisserait supposer, c'est qu'en ltout temps. l'entrée de cet édifice, occupé par le service
des étapes et l'intendance, est rigoureusement interdit à tout le monde. La même particularité se rencontre à Vouziers, où le Kaiser vint plusieurs fois.
    L'empereur arrivait toujours en auto découverte, précédé et suivi de plusieurs autres. Une fois même, il passa ses troupes en revue sur la place de la Sous-Préfecture, où, d'ordinaire, ont lieu les revues du 14 juillet. Une gravure de la revue illustrée allemande Die Woche (La Semaine), vendue à Montmédy, le représente devant la maison Hamot-Richard, siège de la Kommandantur, pendant que ses soldats défilent devant lui. Les commerçants allemands élablis à Montmédy vendent aussi des cartes postales illustrées représentant cette scène.
    Son Impériale Majesté traversa Marville, village éloigné de 12 kilom. de Montmédv, à deux reprises: la première fois, elle y coucha dans la maison de M. Edmond Mouton, ancien maire, décédé lors de l'entrée des Allemands qui fusillèrent un habitant de la localité, M. Bertignon, ancien receveur de la régie, sans motif, en y pénétrant.
Cette habitation était confiée à la garde de deux dames de Marville; en remerciement de l'hospitalité qu'il s'y adjugea, l'empereur donna à l'une d'elles une lettre de sauvegarde pour cette maison et pour sa personne pendant toute la durée de la guerre.
    Quelque temps après, il repassait à Marville avec l'impératrice; à cette occasion, défense fut faite aux habitants de sortir ou stationner dans les rues pendant son passage.
    [On n'a pas jugé opportun de reproduire ici une assertion de l'auteur anonyme, trouvée en partie tendancieuse et en partie inexacte.]
*
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    A propos du passage des Allemands à Marville, un officier qui en est originaire, le lieutenant Laurent, fit prisonnier un officier allemand, sur lequel il trouva les indications suivantes :
    « 17 septembre. J'habite Marville, dans une maison qui a l'électricité (celle de M. Fernand Simon). Les Français sont bien peu pratiques. Ils pouvaient mettre l'électricité dans tout le pays. Nous fusillons un paysan, je ne sais pas pourquoi. Contrairement aux autres pays que j'ai traversés, Marville a peu souffert, à peine 30 maisons de détruites. J'irai voir les crânes que les Français ont retirés du champ de bataille de 1870. (Il s'agit de l'ossuaire de Saint-Hilaire, bien antérieur à 1870.)
    « 18 septembre. - Nous partons pour Dun, où on entend la canonnade. »
    Von Grafold,
lieutenant d'infanterie au 36e bataillon de pionniers.

Les amours du Kronprinz à Montmédy et Stenay

  Lors de la première invasion prussienne en 1792, Frédéric-Guillaume II, Roi de Prusse, qui, lui non plus, ne brillait ni par l'esprit ni par l'intelligence, mais qui, au moins, était un bel homme, avait vu une châtelaine francaise s'amouracher de lui et devenir sa favorite, et la traînait avec lui au cours de sa courte campagne.
    Les Français dirent malicieusement, à cette époque, que c'étaient les seuls lauriers qu'il emportait de France.
    L'actuel Kronprinz, au profil d'aztèque, simiesque, pourra donner lieu aux mêmes réflexions. La gloire et la popularité, il ne les a connues qu'en faisant sculpter son faciès en tête de pipe qu'il envoya à ses soldats dans l'Argonne au 1er janvier 1915.
Quant à ses succès, ils consistèrent dans l'effraction de quelques maisons, leur pillage, la mise à mal de nos meilleures caves, et aussi la prise de vertus plus faciles à enlever que les forts de Verdun, cc qui provoqua dans la presse allemande, pourtant peu chatouilleuse, de sévères commentaires.
    Déjà, dans le Grand-Duché de Luxembourg, à Esch-surAlzette, où il avait établi son quartier général, il scandalisait les Luxembourgeois en traversant les rues de leur capitale en voiture découverte avec une beauté de l'endroit, peu farouche, qu'il avait subjuguée, bien qu'il fut marié et à la veille d'être père de nouveau. Aussi pour couper court au scandale et aux réflexions, Guillaume II le colla-t-il aux arrêts de rigueur.
    On sail qu'à Varennes-en-Argonne, il était accompagné de tout un sérail boche amené dans ses fourgons, qui campait sous des tentes, et qu'on faisait passer pour des étudiantes allemandes.
    Pendant ses séjours à Stenay et Montmédy, il obtint les faveurs de plusieurs habitantes de Stenay, dont une jeune fille. Il récompensa les complaisances de celle-ci en installant un magasin d'épicerie pour sa mère. De fréquentes promenades en auto étaient faites en tête à tête, le quartier général se trouvant au château des Tilleuls, à Stenay. Etant à Montmédy, on l'appelait la Kronprincessin. A chaque visite du Kaiser à Stenay, une gerbe de fleurs lui était offerte au sortir dc la messe, sur le portail de l'église, par celle qui jouit des faveurs du fils. La femme du Kronprinz, venue à Stenay courant de février, a reçu, elle aussi, une magnifique gerbe de fleurs de l'amie de son mari... Elle ignorait sans doute cette parenté de la main gauche.
    L'héritier de la couronne se complaît d'ailleurs avec des créatures que le dernier des soldats français ne voudrait pas toucher avec des pincettes.

    L'attitude et les procédés allemands

    La surprise de l'ennemi fut si grande d'entrer à Montmédv sans résistance que c'est peut-être à cette particuilarité que la ville dut de n'être pas trop maltraiée. Ce fut une des rares, cités occupées par eux, qui n'eut pas à payer de contribution de guerre.
Sans doute, les envahisseurs pillèrent toutes les maisons inhabitées, mais ils furent moins cruels qu'en Belgique. D'ailleurs, et comme en 1870, les occupants des premiers jours furent bientôt remplacés par des hommes du landsturm plus rassis et plus débonnaires, pères de famille, et moins surexcités par des combats quotidiens. Les soldats allemands finirent même par donner de leur pain KK aux habitants pauvres. Ils touchaient trois pains par semaine et suffisamment de viande. En arrivant, les boches passèrent en revue les vases de nuit des habitants — chacun prend son plaisir où il le trouve — afin de s'édifier de visu et de sentu sur la réputation de saleté et de pourriture des Français qu'on leur inculque. Une personne chez qui ils n'en trouvèrent pas, fut soumise à un interrogatoire en règle et plutôt comique, quoiqu'un peu embarrassant pour expliquer en détail cette absence de récipients et justifier comment elle pouvait s'en passer. Pour un peu, on lui eût fait mimer la scène.
    Leur première préoccupation , à leur arrivée, fut la visite et l'inventaire des caves, effectués avec le concours forcé de M. Collet, un des doyens du Conseil municipal, réquisitionné à cet effet; il fut chargé aussi, dans les premiers temps du service de balayage des rues et places de la ville avec les garçons de 14 à 17 ans, préposés à cette opération. Plus tard, cette besogne fut confiée aux prisonniers français. Ces diverses marques de confiance ( !) n'évitèrent pas à M. Collet, homme fort paisible et des plus honorables, âgé de 70 ans, les pires mésaventures; au contraire elles semblèrent les attirer sur lui.
    Le 31 octobre, il 10 heures du soir, il fut réveillé par de violents coups de crosse dans porte; c'étaient les Allemands qui venaient perquisitionner chez lui, l'accusant d'appartenir à un service secret de renseignements et de n'avoir pas signalé, comme il aurait dû le faire, étant conseiller municipal, des voisins qui avaient enterré des armes dans un jardin contigu au sien. Il s'agissait de la famille Jacquemin, dont un des membres est chef armurier et avait laissé à Montmédy une panoplie d'armes que ses parents avaient cru prudent d'enfouir, ce dont les boches fuirent néanmoins informés; ils emmenèrent cette famille au poste, la questionnèrent et finirent par la relâcher devant l'évidence de sa bonne foi. Pendant une heure, ils fouillèrent  et bouleversèrent tout chez M. Collet sans rien trouver; ils l'emmenèrent avec sa femme pour les incarcérer, lui dans la ville-haute, et elle au violon niunicipal, où elle passa la nuit, vêtue d'un seul peignoir, dans une cave humide et froide. Comme M. Collet voyait ses gardiens bousculer sa femme, il voulut intervenir et la protéger; mal lui en prit; il fut assailli de coups de crosse et en eut même l'épaule démolie; il fut conduit à la ville-haute, jeté dans une buanderie près de l'église, où il passa la nuit et le lendemain enfermé dans la maison d'arrêt où il souffrit beaucoup; il y fut mis au secret ainsi que M. Emile Grandjean, maire de Jametz, M. et Mme Guasquin, de
Dun-sur-Meuse, sous l'inculpation collective énoncée plus haut. Le 7 décembre, on les conduisit à Rastadt, où ils séjournèrent plusieurs mois et furent rongés de vermine. Le 7 février, il rentrait en France, libéré, mais entièrement sourd; Madame Guasquin fut rapatriée quelques jours plus tard. MM. Guasquin et Grandjean, ayant avoué moins de 60 ans, furent maintenus en captivité en raison de leur âge. Au début de l'occupation, les boches fusillèrent un vieillard de 80 ans, M. Deplaye, de Fresnois, écart de Montmédy, chez qui on avait trouvé, au fond d'une malle, un vieux pistolet à pierre; ils envoyèrent en Allemagne, comme prisonnier, son fils, ancien sous-officier de gendarmerie, dont on n'eut jamais de nouvelles.
    La mortalité ne sévit pas beaucoup parmi les habitants; on ne cite guère, comme morts, que Mesdames Pierrot-Caumont, du « Journal de Montmédy », Renson-Berque, Leclerc, femme du photographe; MM. Corneroute, restaurateur, Emile Viesselet, ancien chapelier.
    Il nous faut mentionner un incident qui démontre jusque dans les plus petites choses l'étendue de l'hypocrisie allemande.
    Une dame de Montmédy-haut avait été transférée dans l'ancien presbytère de la ville-basse (maison Ponsignon) elle avait la garde et la surveillance des objets du culte, vêtements sacerdotaux, qui étaient réunis là, tout près de l'église. Dans cet immeuble logeaient aussi des infirmiers militaires allemands. Ceux-ci aperçurent l'uniforme de Suisse, qu'ils prirent peut-être pour un uniforme de général français ou eurent l'intention de faire passer comme tel. Ils s'en emparèrent donc comme d'un précieux trophée; mais la vigilante gardienne de la garde-robe d'église veillait elle découvrit le pot-aux-roses, qu'elle signala à la Kommandantur.
    Grand émoi devant la gravité de cette accusation qui entachait l'honneur et la réputation d'honnêteté de l'armée allemande. Pourtant devant la precision des détails et l'insistance de la plaignante, il fallut se rendre à l'évidence des faits. Promesse d'une punition sévère pour faire un exemple; bref, l'affaire tourna plus ou moins en eau de boudin et l'uniforme fut rendu, tout comme an temps oùFrédéric-le-Grand restituait le moulin de Sans-Souci et volait des provinces.
A Damvillers, chef-lieu de canton distant de 22 kilom. de Montmédy et pays natal du grand peintre Jules Bastien-Lepage, ils ont pillé la maison de ce dernier, où son frère, M. Emile Bastien-Lepage, conservait avec une pieuse fierté les premières études de son regretté frère; ils ont ramené ces toiles au Musée de Montmédy, et ils justifient ce cambriolage en disant aux Montmédiens que ce déménagement constitue une mise en sûreté prouvant leur sympathie pour les arts.
Ils se livrèrent aussi plusieurs fois en octobre dernier à des perquisitions inopinées chez les habitants possédant le téléphone, qui, d'après eux, servait à communiquer avec les Français, accusation invraisemblable, puisqu'ils détenaient le bureau de poste; ces perquisitions
s'accompagnèrent de séquestration des personnes où avaient lieu ces descentes, pendant plusieurs heures, parfois vingt-quatre.
    Vers le milieu de novembre, une jeune fille de 17 ans, fut dirigée sur l'Allemagne dans les conditions suivantes :
    Son minois ayant plus à un officier allemand, un vieux barbon la trogne rougeaude et embroussaillée, celui-ci la suivait constamment dans la rue avec insistance; un beau jour, il lui adressa la parole et lui fit des propositions que l'on devine. La jeune fille l'envoya promener en le traitant de vieux.. Fureur du boche, plainte à la Konmmandantur, comparution de la délinquante devant celui-ci, où on lui déclara que son cas était grave, car elle avait insulté un officier allemand. Elle n'eut pas de peine à se justifier, mais elle reçut une sérieuse mercuriale; il lui fut dit que les entreprises dont elle avait été l'objet ne se renouvelleraient pas et qu'elle pouvait, en toute sécurité, rentrer chez elle. Quelques jours après, elle était enlevée et expédiée sur Rastadt, où elle demeura quelque temps, puis fut rapatriée par la Suisse.
    Un gardien de prison, M. Martin, fut condamné par le conseil de guerre à être emprisonné dans une forteresse pendant plusieurs mois, pour avoir crié : Vive la France! à l'enterrement d'un blessé francais!
    Les boches ne cachent pas leur rancune envers MM. Poncaré, Edward Grey et Delcassé, qui sont leurs trois bêtes noires; ils ont dessiné des caricatures à la craie du premier sur les murs de leurs hangars, où ils le représentent, avec leur esprit particuliers, affublé d'un costume d e paysan, d'un panier et d'un parapluie campagnard. Par contre, ils ne tarissent pas d'éloges sur le Général Joffre, qu'ils proclament « le plus grand génie du siècle ».
    Sur tous les bâtiments publics, ils ont écrit à la craie « Gott strafe England. Er strafe es » (Que Dieu punisse l'Angleterre; il la punira).
    Les rues et places ont été baptisées (le noms allemands. La grand'place est devenue Berliner Platz; la rue Mabille, Kronprinzessin Strasse; la place de la Sous-Préfecture, Kommandantur Platz; la rue de Luxembourg et son
prolongement, l'avenue de la gare, Bahnstrasse. Ils ont mis les horloges publiques à l'heure allemande.
    Sur la demande du maire, ils ont autorisé la réouverture des classes; elles se font avec le concours des institutrices restées ici-bas, en français, dans le salon de l'hôtel-de-ville, coupé en deux par une cloison de fortune.
Les Allemands publient et font distribuer un journal imprimé en français à Charleville : La Gazette des Ardennes, où ils soutiennent naturellement leur cause et leur pays. Ils y publient même un feuilleton d'Alfred Capus, dont ils n'oublient pas de mentionner le titre : Membre de l'Académie française. Ils reproduisent textuellement les communiqués allemands et français, grâce à quoi ils se donnent une apparence d'impartialité, à l'abri de laquelle ils espèrent faire avaler plus facilement leurs informations tendancieuses.
    L'imprimerie du Journal de Montmédy est occupée par leurs ouvriers, qui l'utilisent pour la composition et l'impression de documents officiels : avis, proclamations, etc ; le propriétaire a le droit d'y pénétrer et de s'en servir à condition d'en faire la demande 24 heures à l'avance à la Kommandantur, qui lui fixe les heures de la journée pendant lesquelles il pourra y avoir accès, sous la surveillance d'un planton et à condition d'en laisser les portes ouvertes pendant son séjour.
    Les hommes de 18 à 60 ans sont employés chaque jour à faire les corvées, ce qui est un moyen pratique de les tenir en surveillance; ceux de 16 à 20 ans doivent se présenter tous les jours à11 heures du matin à la mairie devant un officier allemand pour faire constater leur présence.
    Les officiers allemands ont perdu leur arrogance primitive, Ils ne paraissent pas déprimés ni ne s'avouent vaincus, mais ils sont devenus plus modestes. Ils protestent quand on les traite de barbares, prétendant que ce sont les Français qui leur ont déclaré la guerre. Ils prétendent qu'ils ne tiennent pas à prendre Verdun ni Paris, et qu'ils se contenteront, pour faire la paix, d'une alliance avec la France contre l'Angleterre; d'après eux, ils ne peuvent percer nos lignes et nous ne pouvons percer les leurs.
    Ils ne cherchent pas trop à dissimuler les événements qui leur sont défavorables, comme l'attaque des Dardanelles et la prise de Przemysl, mais ils se rattrapent en leur déniant toute importance.
La fête de l'empereur fut célébrée en grande pompe etle matin il y eut grand messe solennelle à l'église, revue des troupes sur la place de la Sous-Préfecture. Toutes les fenêtres des maisons furent pavoisées par Messieurs les boches de sapins entiers, arrachés dans les plantations voisines.
Une fois, au milieu de la nuit, l'hiver dernier, la poplation fut réveillée par une vive fusillade; des habitants, accourus aux fenêtres pour se renseigner, faillirent recevoir des balles.
    C'étaient les boches qui célébraient par une mousquetade inutile la prétendue prise de Paris. Telle fut l'allégresse provoquée chez eux par cette nouvelle sensationnelle, qu'un groupe d'infirmière allemandes, domiciliées dans une maison particulière, se précipitent en chemise de nuit sur le trottoir et y dansent une ronde échevelée sous le regard narquois des habitants nullement emballés par leur grâce et leur plastique. Le lendemain, il y avait maldonne et il fallut en rabattre.
A noter enfin que les soldats prélevés sur la landsturm en garnison à Montmédy pour être envoyés comme bouchetrous en Argonne, pleuraient à cette nouvelle, sachant par les récits de leurs camarades, qu'ils allaient à la mort. L'ennemi râfle tous les objets en cuivre pour les envoyer en Allemagne; il a ainsi démoli et expédié les appareils de la brasserie du docteur Spiral. En échange, il donne des bons contenant des évaluations arbitraires au-dessous de la réalité. Si on lui demande qui remboursera ces bons, il répond que ce sera la France, ou qu'une entente interviendra après la guerre à ce sujet entre les deux pays.
L'attitude des autorités municipales et des habitants fut particuliéremnent digne, correcte et courageuse. Comme en 1870, où ils supportèrent sans faiblir un siège de trois mois, deux bombardements et une occupation allemande de trois ans, et où les représentants de la municipalité allaient, la veille de la reddition, protester auprès du gouverneur pusillanime, contre une capitulation prématurée, celte fois encore, ce fut la population civile qui, par sa belle tenue sauva l'honneur de la cité.
Bien que se sachant exposée tôt on tard au bombardement des Allemands ou des Français, la population se décida à rester, les anciens, qui avaient connu l'autre guerre, déclarant qu'ils avaient vu 1870 et les prussiens, qu'ils n'en avaient pas peur et que ce ne serait pas plus dur cette fois-ci, les plus jeunes pour faire comme leurs aînés.
    Une partie des fonctionnaires et leurs familles furent évacués en auto sur Stenay et Vouziers à la fin d'août; le Sous-Préfet, conformément aux ordres reçus, quitta Montmédy au moment où les ponts allaient sauter en arrière et gagna Verdun par Stenay, Laneuville, Wiseppe, Montfaucon, se retirant pied à pied devant l'envahisseur.
    Le receveur des finances, le juge de paix, le conservateur des hypothèques demeurèrent à Montmédy pour un motif ou pour un autre.
    Le maire, M. Poulain, chevalier de la Légion d'honneur, ancien directeur de l'Enseignement primaire à la Préfecture du Nord, beau vieillard à la barbe de patriarche, n'avait été nommé à ces fonctions qu'en mai dernier. Il n'en fut que plus résolu à en assumer la responsabilité intégrale. Il écrivait è un de ses parents des Ardennes, qui. au début de la guerre, lui offrait un asile chez lui « Je suis comme un capitaine à bord de son vaisseau : je dois demeurer à mon poste. »
Une mère écrivait le 20 août à son fils, fonctionnaire au dehors : « Je ne sais pas si nous nous reverrons, fais ton devoir jusqu'au bout. »
Il n'y eut, dans les rangs du Conseil municipal, que les deux vides causés par la mobilisation. L'adjoint, M. Bailleux, conseiller d'arrondissement, resta, lui aussi, à son poste. Très peu d'habitants crurent devoir s'éloigner volontairement, tant l'exemple du sang-froid et du courage est contagieux, tout comme celui de la lâcheté.
    De fait, la population ne fut pas malmenée; tracassée, dérangée dans ses habitudes, soumise aux réquisitions et au pillage, elle dut subir tout cela; mais en regard d'autres populations plus pressurées et plus durement menées, elle fut privilégiée.
   Un  beau jour, après que l'ennemi eut pillé toutes les maisons de la ville-haute, évacuées depuis longtemps par ordre de l'autorité militaire française, les habitants de Montmédy-haut furent convoqués à la Kommandantur, où on leur demanda de signer une déclaration constatant que leur immeuble avait été pillé par les soldats français; tous refusèrent avec ensemble et énergie, sauf un seul, et les choses en restèrent là.
    Les enfants, de leur côté, se montrèrent insouciants autant que leurs parents; tous leurs loisirs étaient employés à la guerre dans les rues et sur les places, avec des sabres et des fusils de bois; il y avait le camp français et le camp boche, toujours battu, cela va de soi. Un jour même, dans leurs ébats turbulents, ils lancèrent des pierres par inadvertance dans les vitres d'un train sanitaire qui passait   Ils s'en tirèrent à bon compte : la Kommandantur se borna à défendre à leurs parents de les laisser désormais jouer dehors, pour éviter le retour de ces faits. Ils s'en vengèrent en fredonnant : « Vous n'aurez pas l'Alsace », l'air de Sambre-et-Meuse, ou en sifflant de plus belle la Marseillaise. Ils avaient même construit sous les yeux des Allemands, impassibles, un petit fort en sable, nommé par eux Le Vengeur.
    Il y eut bien, évidemment, comme partout, quelques défaillances isolées, quelques complaisances à relever dans une agglomération de plus d'un millier d'individus, mais elles émanaient d'étrangers à la ville et non de véritables Montmédiens; les unes relèvent de la police des moeurs, les autres du mépris public. Les Allemands prirent d'ailleurs soin d'envoyer eux-mêmes travailler ailleurs, une ou deux femmes de conduite légère.

L'attitude de la population

La vie, les vivres, le ravitaillement; les environs

    L'existence, pour les habitants, s'écoule en somme susqu'ici assez paisible, à part les contre-coups et vexations inévitables. Bien que l'heure allemande (55 minutes de différence) soit devenue l'heure officielle, les habitants ou presque tous ont conservé l'heure française pour leurs montres et horloges.
    Les offices religieux ont lieu comme auparavant et sont célébrés par le vieux curé archiprêtre, l'abbé Robert.
    Un des deux pharmaciens, M. Rodange, est prisonnier sur parole, moyennant quoi il est autorisé à exercer sa profession comme il peut. L'autre, M. Poulain, n'est pas astreint à cette formalité, sans doute parce qu'il est le fils du Maire.
    Les vivres et denrées ne manquent pas, sauf le pétrole, le veau et le mouton. On mange d'excellent cheval, M. Perceval, bouclier, est réquisitionné par les Allemands pour assurer leur service de boucherie; ils ont même donné son nom à la rue conduisant à l'abattoir Percevalstrasse. L'autre boucherie, celle de Madame Lhermite, dont le fils, soldat à Montmédy, est prisonnier en Allemagne, fonc-
lionne également et fournit à crédit la viande aux habitants.
    Les deux marchés ordinaires du mercredi et du samedi sont maintenus et sont pour le moins aussi achalandés qu'auparavant; au lieu de se tenir devant la mairie, ils se tiennent maintenant sur leur ancien emplacement d'il y a trente ans, dans la rue des Tilleuls. On y trouve facilement du lait, des œufs à 1,25-1,50 la douzaine, du beurre à 1,40 la livre, des poulets, lapins, légumes; le sucre est vendu 1,90 les 2 k.500, et provient de Stuttgart; le café tout grillé, provenant de Belgique, se vend 1,50 la livre.
    Les Allemands ont fait venir 10000 jeunes bêtes, veaux, poulains, génisses, qu'ils ont installées dans les parcs; ils ont réquisitionné tout le blé du pays, qu'ils payaient 22 et 23 francs le quintal; un quart seulement est payé en argent, le reste en bons ou papier-monnaie; ils revendent la farine de seigle 56 à 60 fr. le quintal.
Ils délivrent aux habitants du pain KK qui est moins mauvais que celui fabriqué en Allemagne. Les habitants ont droit à 140 grammes de pain (90 pour les enfants) et à 75 gr. de viande par jour et par personne, mais la contrebande qui se fait par la Belgique, ravitaillée par l'Amérique, permet de payer le pain 5 sous la livre au lieu de 6 1/2. Les habitants ont d'ailleurs pris la sage précaution d'acheter des provisions de blé, à raison de 150 fr. les 100 kg.; ils passent les grains an tamis, les écrasent ensuite an moulin à café, et fabriquent ainsi une farine rudimentaire qui leur permet de fabriquer du pain sain et nutritif.
    Dans la maison Sauvage est installé un friseur (coiffeur allemand) Des épiciers sont venus d'Allemagne avec leurs produits, qu'ils vendent aux habitants : riz, macaroni, sucre, café, etc. Les réserves alimentaires constituées par les habitants à la veille de la guerre ont beaucoup aidé ceux-ci. Les boches n'ont pas hésité à vider les magasins français abandonnés par leurs habitants, pour les garnir de leur camelote. Au Familistère Derelle, ils ont enlevé jusqu'aux corsets, ont chargé le tout sur des voitures, et sont allés les brûler dans les champs, près du magasin de peaux Kintzinger, cela afin de faciliter la vente de leurs produits.
    On trouve facilement de la bière venant de la brasserie Motsch à Avioth, qui continue à fonctionner. Pas de vin, sauf le vin du Rhin, plutôt mauvais, que les Allemands vendent deux marks (2 fr. 50) la bouteille.
L'arrivée du printemps a permis de cultiver les jardins et de préparer ainsi une récolte de légumes, facilitant d'autant plus l'approvisionnement que presque chaque famille possède on loue un jardin.
    Depuis le mois de mai, la population est ravitaillée en farine à la suite d'une démarche sur place du consul américain de Belgique, d'un sénateur du Nord, qui vinrent conférer à la mairie avec les autorités civiles et militaires. Le ravitaillement est fait par la Belgique.
Les habitants n'eurent jas trop à souffrir du froid au cours de l'hiver, grâce aux mesures de l'autorité militaire, de concert avec la municipalité. En novembre 1914, cette dernière fit demander à chaque famille combien elle voulait et pouvait acheter de houille. Avec ces indications, il fut commandé la quantité nécessaire au prix de 42 fr. les 1.000 kilogs, qui fut livrée en wagons le plus près possible des quartiers à desservir, et même sur le trajet du chemin de fer en ville, devant la maison du destinataire, quand la chose était possible.
    Il est probable qu'au prix où les envahisseurs avaient trouvé cette houille, ils réalisaient un bénéfice de 42 francs, mais ils ne manquaient pas de faire ressortir que sous leur occupation, la houille coûtait moins cher que sous le régime français.
    Ils obligèrent par contre les habitants à échanger leur or, leur argent, leurs billets français contre des billets boches chez les commerçants allemands.
    Les villages des environs sont tranquilles et encore habités en partie; des patrouilles allemandes y circulent de temps en temps. La gare d'Ecouviez a conservé son activité et l'importance de son trafic.
    A Juvignv-sur-Loison (7 km. de Montmnédy ). l'important moulin Sévrin a continué à moudre du blé jusqu'en mars dernier, époque â laquelle le manque de charbon l'a obligé à suspendre sa fabrication.
    A Damvillers, il reste encore quelques femmes que l'ennemi oblige à cultiver les champs et à y porter elles-mêmes et à y répandre le fumier nécessaire à leur fumure; ils ont fouillé tous les jardins pour y trouver les magots cachés par les habitants et ils en ont trouvé pas mal, qu'ils ont enlevés, naturellement; ils ont d'ailleurs pillé la localité de fond en comble.
    À Thonne-les-Prés se trouve un détachement allemand dont les offIciers occupent le château d M. de Benoist. L'auberge Simon, située en face a été détruite par un incendie accidentel qui a consumé en même temps plusieurs autos boches qui s'y trouvaient. Pour ce fait, et parce qu'ils supposaient une intention criminelle, les Allemands incarcérèrent le propriétaire à Montmédy et se décidèrent à le relâcher après. Le cocher de M. de Benoist fut, lui aussi, emprisonné pour une cause inconnue, et y mourut; on raconte qu'il avait été sommé d'indiquer la soi-disant cachette où ses maîtres avaient mis leur argent et leurs objets précieux.
Le château de Louppy-sur-Loison, qui était occupe par une ambulance française avant l'occupation allemande, paraît inoccupé, mais a été dévalisé de ses admirables trésors artistiques. On signale cependant qu'en dernier lieu, un général habitait le château et y avait établi son quartier général. La commune est occupée par cinq à six cents soldats allemands du génie. La scierie de M. le marquis d'Imécourt fournit l'électricité au village, et qui a été installée par eux. Ils exploitent, comme partout, les forêts voisines, amènent les arbres à la scierie, les débitent et â l'aide d'un rail qu'ils ont monté, conduisent les produits è la gare de Louppy (ligne de Montmédy à Verdun).
Les habitants ont droit è 125 grammes de pain de seigle, qu'ils paient 0,30 c. la livre.
    A Montmédy, malgré l'occupation ennemie et ses rigueurs, les habitants sont au courant des événements politiques et militaires. Des officiers allemands reçoivent Le Matin, Le Journal, et il en filtre des bribes qu'on se communique de bouche en bouche; ils sont renseignés aussi par les confidences d'officiers boches, ou par la Gazette des Ardennes, où ils font d'eux-mêmes la sélection des nouvelles à retenir ou à écarter.
    Depuis quelque temps, les Allemands autorisent les Montmédiens qui le désirent à rentrer en France par la Suisse, et un certain nombre de nos concitoyens ont profité de cette facilité; parmi ceux-ci, le docteur Maillard, chevalier de la Légion d'honneur, conseiller général de
Damvillers, qui fut d'abord interné chez lui pendant plusieurs mois avec défense de sortir et un factionnaire è sa porte. Il fut ensuite, avec Mme Maillard, transféré à Montmédy, où ils passèrent l'hiver, et quittèrent cette ville pour la France le 12 mai 1915.
    A Marville, M, Dupuy père cuit le pain. Mme François est morte le 20 septembre, et Mme Thérèse à la Toussaint; Mme Renson et M. Denis père ont été opérés à Montmédy et vont bien. Le docteur Dubois, qui habitait à l'hospice avec sa femme, est mort le 15 janvier. Mme Jacques Danlozer y demeure aussi avec Mme Pognon. On est toujours sans nouvelles depuis le 27 août d'Emile Renaud, disparu, laissant une femme et huit enfants.
    A Iré-le-Sec, il est interdit aux habitants de causer entre eux sous peine d'une amende de 10 fr.; il y en a tous les [texte incomplet]

1 En réalité. Sommethonne est au Nord-Est de Montmédy.
2   II s'agit ici de Robelmont et non le Paliseul qui se trouve à 32 km au nord de Sedan.
3 Pour plus de détails sur tous ces combats, lire De Verdun à Mannheim, du Dr SIM0NIN, et les trois ouvrages du Ct GRASSET
Neuchâteau. - Ethe. - Virton.
4 Lire : Lejay.
5 Lin, : Servanti.
6 De Thonne-la-Long.
7 D'Avioth.
8 Lire : Bonnaud.
9 10 11 De Montmédy.
12 Les six premiers nommés, du corps des douanes: les cinq autres, cultivateurs.
13 Sur le combat de Brandeville Murvau, lire également :
     Ch. BRUNNEAU, L'invasion allemande, août-sept. 1914 .
     Lt-Cl CHENET, L'odyssée de la garnison de Montmédy.
     Cap, JULLIAC, Montmédy 1er-29 août 1914.
     Ed. ROUSSEAUX, Les Preux du 91e,de ligne. - Le 45° territorial au feu.
     Dr CHAGNAUD, Le 91e d'Infanterie.
14 Erreur le frappe: lire : de Benoist.

Annexe
•À Juvigny deux soldats sont repris, la fille du maire, Mathilde Maquet est envoyée en Allemagne.
•À Villecloye, le 30 juin 1915, un autre soldat est trouvé, l'habitant qui l'héberge est condamné à deux ans et demi de prison, sa femme à un an et le village à 12000 mark d'ammende. Une reproduction de l'affiche placardée dans le village visible dans le livre de M. Lanher.
•À Lion-devant-Dun, M. Herbinet, cultivateur, qui cachait trois survivants de la bataille a été dénoncé et envoyé en Allemagne. Un des poèmes qu'il a écrit en 1918 a été lu par l'adjudant-chef de Gendarmerie, Lienard, commandant de la brigade de Gendarmerie de Damvillers, pour la commémoration de la bataille le 24 août 2000.
• Jules GODFRIN, rescapé de la Bataille à réussi à se cacher pendant toute la durée de la guerre dans sa famille à Mont-devant-Sassey.